Quitter le Honduras pour une vie meilleure

Inclusion sociale
6 mars 2023 •  Par Centraide
Femme souriante

Quelque part en 2017. Wendy Raudales et son mari travaillent dans l’entreprise qu’ils ont mise sur pied deux ans plus tôt, au Honduras. Une journée comme les autres… jusqu’à ce que des membres d’un groupe criminel viennent leur faire des menaces violentes.  


Au Honduras, le problème des gangs est bien réel. Ces derniers exercent un contrôle territorial sur les quartiers et extorquent les résidents à l’échelle nationale. Ce pays d’Amérique centrale est coincé entre l’extrême pauvreté et l’ultraviolence[1].  

« Au Honduras, très peu de personnes accèdent à l’université, raconte Wendy. Mon mari et moi avons eu cette chance. J’ai étudié l’administration des affaires et lui, le design graphique, puis nous avons ouvert notre propre entreprise. Nous y avons investi toutes nos économies. »  

Mais les groupes criminels ont transformé leur rêve en cauchemar. La sécurité de Wendy, de son mari et de leurs deux enfants était sérieusement compromise.  

« Quand j’étais jeune, mon père a été kidnappé et ma famille a dû payer une rançon, se remémore-t-elle. Je ne voulais plus vivre dans ces conditions. En quelques mois, nous avons décidé de partir. Notre choix s’est arrêté sur le Canada. Nous avons vendu notre voiture, fait nos valises et acheté des billets d’avion pour New York parce que c’était quatre fois moins cher que des billets pour Montréal. » 

Une amie les a ensuite conduits vers la frontière du Canada, puis les a regardés partir à pied dans la neige, à la recherche d’une vie meilleure. 

« Nous sommes arrivés en janvier 2018. Je me rappelle que les médias parlaient d’une tempête historique ce jour-là, souligne Wendy. Nous avancions dans le blizzard avec toute notre vie dans nos bagages. »  

À la frontière, la famille a demandé l’asile. Après une journée complète passée dans le petit bureau de l’immigration, Wendy est ressortie avec un document du demandeur d’asile (ou « papier brun ») dans une main et l’adresse du YMCA dans l’autre.  

« Nous ne connaissions personne au Québec, relate-t-elle. Nous avons dormi pendant 15 jours au YMCA. » 

Celle qui parlait seulement espagnol à ce moment se rappelle le soutien précieux d’un travailleur du Carrefour le Moutier, un organisme de la Rive-Sud, qui les a aidés à trouver un logement.

« Il parlait de logement chauffé, d’appartement meublé, de 3 et demi, de 4 et demi… on ne comprenait absolument rien! » se souvient Wendy en riant. « Mais une chance qu’il était là. » 

Au Carrefour le Moutier, la famille immigrante a également assisté à des séances d’information sur l’aide sociale, sur les soins de santé en hiver, mais surtout, le conseiller accueil-intégration les a accompagnés à travers les documents, cartes et permis essentiels.  

Nouveau départ 

Deux petites semaines seulement après avoir mis les pieds au Canada, Wendy et sa famille emménageaient dans un appartement à Greenfield Park. Trois mois plus tard, ils recevaient un permis pour travailler.  

« À notre arrivée, ma plus jeune n’avait que 4 ans, raconte Wendy. Puisque les demandeurs d’asile n’ont pas accès aux garderies subventionnées, je n’avais pas vraiment le choix de rester à la maison avec elle. »  

Wendy s’est tout de même inscrite à des cours de francisation, à raison de six heures par semaine. Au Carrefour le Moutier, un service de gardiennage des enfants est offert gratuitement pendant que les parents apprennent le français.  

Ce n’est qu’à la rentrée 2019 que Wendy a pu se consacrer à temps plein à l’apprentissage du français, alors que ses deux filles fréquentaient l’école.  

« Il est très difficile de s’intégrer si on ne parle pas le français, note la Hondurienne d’origine. Mon mari et moi avons décidé de mettre les bouchées doubles et nous avons consacré deux années entières à l’apprentissage de cette langue. »  

Pendant ce temps, à l’été 2019, leur statut est passé de demandeur d’asile à réfugié accepté.  

Une rencontre déterminante 

En 2021, une amie a parlé à Wendy d’un projet qui soutenait les femmes immigrantes dans un organisme du quartier Centre-Sud; le Carrefour des ressources en Interculturel (CRIC). Quand elle fait le récit de sa vie au Canada, la Hondurienne d’origine la divise en deux temps. Il y a sa vie « avant le CRIC » et celle « après le CRIC ».  

Wendy a donc découvert cet organisme par l’entremise de Femmes-Relais. Ce projet phare du CRIC vise l’insertion socioprofessionnelle de femmes majoritairement immigrantes. « Les intervenantes du CRIC ont changé ma vie, dit Wendy Raudales. Je n’avais aucune idée de ce que je voulais faire, d’autant plus que mon diplôme n’était pas reconnu. »  

C’était l’occasion de se réinventer. Pendant un an, Wendy a suivi une formation et réalisé un stage comme agente de liaison communautaire au CRIC. Chaque jour, elle rencontrait des femmes qui, comme elle, devaient s’acclimater à une nouvelle culture, en plus de devoir composer avec les traumatismes de leur parcours migratoire. Son plus grand bonheur résidait dans le fait d’aider les autres à s’intégrer.  

Un jour, Wendy a dit à une intervenante : « Si je pouvais aider les immigrants toute ma vie, je le ferais, même sans être payée! » se rappelle-t-elle. Ces paroles ont trouvé écho chez son interlocutrice. 

Peu de temps après, Wendy appliquait au baccalauréat en travail social à l’Université du Québec à Montréal. « Cela m’a pris beaucoup de courage et d’efforts, insiste-t-elle. Les femmes au CRIC m’ont tellement motivée et soutenue, jamais je n’y serais parvenue sans elles. Quand j’ai reçu ma lettre de l’UQÀM, je n’en croyais pas mes yeux. J’avais été acceptée! » lance-t-elle avec fierté.  

Aujourd’hui, les membres de cette famille hondurienne possèdent le statut de résidents permanents. Wendy poursuit ses études et son mari terminera sa formation en animation 3D dans quelques mois. Leurs filles sont totalement intégrées et, aux dires de leur maman, elles adorent la neige. « Nous sommes ici pour la vie », conclut celle qui sera à jamais reconnaissante de son accueil au Québec.   

Et si Wendy était arrivée en janvier 2023?

Depuis que la famille de Wendy a immigré du Honduras en janvier 2018, la situation au Canada a beaucoup évolué. L’année 2022 a été marquée par un afflux sans précédent de personnes et de familles réfugiées et demandeuses d’asile.  

Nous avons voulu comparer les délais d’attente actuels VS ceux que Wendy a connus en 2018 pour les différents éléments suivants : 

*Immigration Canada a adopté en novembre 2022 une nouvelle procédure pour accélérer le traitement des permis de travail accordés aux demandeurs d’asile. Les délais devraient donc diminuer rapidement. 

[1] Source: https://www.hrw.org/world-report/2022/country-chapters/honduras

[2] Source: https://www.centraide-mtl.org/blogue/que-nous-revelent-les-signes-vitaux-sur-le-logement/


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